Dites-nous Laurent Lasselin !

Publié le 8 Août 2013

Publié le 08 août 2013, à 14:26, par philippe.schwoerer  

Fortement impliqué dans la vie associative, écologique et politique, Laurent Lasselin est parti en croisade depuis deux ans pour promouvoir le voiture électrique. Fondateur du Pile VE (Pôle industriel de liaison européen du voiture électrique) qui mène sur le Valenciennois une réflexion poussée dans le domaine, il a tenté et réussi le trajet Monaco-Valenciennes avec une Peugeot iOn. C’était en mars 2012. Les 1.168 kilomètres ont été avalés en 3 jours et 4 heures.

Depuis, Laurent Lasselin cherche à éveiller toutes les bonnes volontés pour qu’un véritable réseau de bornes de recharge soit mis en place en France.

Réagissant à notre article « E.Leclerc au secours de la voiture électrique» mis en ligne le 16 juillet, Laurent Lasselin a ouvertement invité Michel-Edouard Leclerc à participer avec lui à la traversée de la France en voiture électrique. Wehicles a voulu rencontrer ce chevalier du Nord qui a plus d’une idée pour brancher le pays !

véhicule électrique dans les hauts de France à Valenciennes avec REV3

Laurent Lasselin devant sa Peugeot iOn à Valenciennes (place d’Armes) © Laurent Lasselin

Bonjour Monsieur Lasselin. Parlez-nous de vos divers engagements !

Laurent Lasselin : Je pense être un acteur national très engagé dans le domaine de la mobilité électrique de par ma formation, mais aussi par les actions que j'ai menées ou que je mène, tant sur le plan de mon aventure de 2012 pour rallier Valenciennes depuis Monaco en voiture  100/100 électrique, qu’auprès des médias locaux et nationaux.

Par ailleurs, je m’investis beaucoup dans des actions locales, notamment pour venir en aide aux SDF, mais également dans la politique comme conseiller national, et dans une association parisienne, Ecologie R, au côté de Bertrand Pancher, député de la Meuse, qui nous a rejoints récemment !

D'où vous vient cet intérêt pour les véhicules électriques ?

Laurent Lasselin :

On peut se rendre compte que la planète va très mal, avec des catastrophes na

turelles de plus en plus dévastatrices, et une pollution excessive qui asphyxie les grandes métropoles. Une révolution est en train de s'opérer ! Je l’accompagne.

En quoi consiste le "Pôle industriel de liaison européen du véhicule électrique" que vous avez créé ?

Laurent Lasselin : Le Pôle que j’ai créé est une plateforme de rencontres et d'échanges qui est née après ma traversée de la France avec la iOn. Elle a pour vocation d'organiser des tables rondes et des discussions avec des groupes où des personnes qui travaillent autour du véhicule électrique. Elle est là aussi pour pousser à la démocratisation du VE.

Grâce à l’association, j'ai pu rencontrer et échanger avec divers constructeurs et fabricants, mais aussi des personnes comme Gildo Pastor (Venturi), Jean-Louis Borloo et bien d'autres. Ainsi, par exemple, j'ai pu faire passer mes convictions, concernant la disponibilité à tous de bornes de recharge payantes, auprès d’un conseiller régional qui, de son côté, envisageait un système plus fermé.

C’est d’ailleurs un des rôles du Pôle que de donner un autre cours à des projets sur la mobilité, en proposant d'organiser des débats et des événements sur le Valenciennois, en apportant des conseils, ou en frappant aux portes pour transmettre mes convictions.

Ma démarche est totalement bénévole. Je ne suis donc influencé par aucun lobby. J’agis pour l'intérêt collectif !

 

 

Laurent Lasselin avec Jean-Louis Borloo © Laurent Lasselin

Quelles avancées le Pôle a-t-il permises ?

Laurent Lasselin : Le Pôle m'a permis de faire constater le manque flagrant d'infrastructures de recharge sur le territoire. Nous avons voulu vendre des voitures électriques sans installations suffisantes.

Les choses changent. Nous constatons désormais une amélioration de la situation avec l’implantation de nouvelles bornes. Mes remontées sur les réseaux sociaux, vers les élus, auraient-elles permis de faire bouger un peu les choses ? J'en suis certain !!

Avec le Pôle, j’ai pu démontrer qu'un véhicule électrique n'est pas uniquement destiné à un circuit urbain limité, mais qu’avec une infrastructure suffisante, on peut aller bien plus loin.

Enfin, au sein d'un groupe politique, j’ai travaillé sur la rédaction d'une fiche ID clé sur la mobilité.

Pourquoi avez-vous tenu à effectuer le trajet Monaco-Valenciennes en voiture électrique ?

Laurent Lasselin : Monaco et Valenciennes sont deux villes exemplaires ! Monaco fait exemple sur le plan de l'écologie concernant les océans, les missions en Antarctique et la politique environnementale de sa ville. Elle favorise l'installation de prises de recharge, et organise depuis quelques années le salon Ever du véhicule électrique au forum Grimaldi. Cet événement est une véritable vitrine d'information sur le sujet pour le public.

Valenciennes, quant à elle, est un véritable laboratoire, sur lequel Jean-Louis Borloo a pu s’appuyer pour mettre en place des solutions qui ont permis au Grenelle de l'écologie de réussir.

Mais surtout, entre les deux villes, la distance est suffisamment importante pour tester en situation les déplacements longs effectués en véhicule électrique. Ce trajet expérimental sera mon point de référence pour une nouvelle expérience. Oui, les Valenciennois sont démonstrateurs.

Quels ont été les temps forts, positifs comme négatifs, de ce rallye ?

Laurent Lasselin : Des temps forts, il y en a eu tout au long du parcours que j’ai vécu comme une véritable aventure, aussi fortement que certains en découvrant de nouveaux continents, ou en posant un pied sur la lune. C’est différent, certes, mais les difficultés rencontrées chaque jour étaient véritables. J'aime assez le terme d'aventure qui correspond le mieux à ce challenge.

Va-t-on me donner la possibilité de recharger ? Vais-je réussir à atteindre mon point d'arrivée ? Voilà les questions qui trottaient en permanence dans la tête. C'est finalement sur les quelques kilomètres qu'il me restait à parcourir, que j'ai véritablement failli tomber en panne. A une dizaine de kilomètres avant Valenciennes, j'étais sur le point de perdre mon pari. Non, impossible pour moi d’envisager abandonner si près du but ! J’ai pu passer la zone inhabitée dans un grand "ouf", et trouver une âme charitable pour me permettre de recharger une heure afin d’arriver à destination. Mission réussie avec succès !! mais un peu de temps perdu, presque six heures, sur mes prévisions de départ.

Ma mobilisation me permet de me sentir vraiment concerné par la mobilité durable dans cette période charnière que nous sommes en train de vivre. Nous sommes à l'aube d'une nouvelle ère industrielle, qui s'opère déjà !

Quoi que peuvent en dire les détracteurs, le véhicule de demain sera électrique, avec une probable période de transition comptant sur les hybrides rechargeables. Mais on peut penser que l'alimentation en énergie sera plus tard différente, avec d'autres sources de production, et le développement des piles à combustible ou des systèmes flash à accumulateur condensateur. La recherche doit innover, dans les nanotechnologies notamment !

Ma vision de l'automobile du futur l’inscrit dans une connexion intelligente avec les réseaux domestiques en charge d’alimenter la maison. Les habitations à énergie positive produiront suffisamment d’électricité pour recharger la voiture.

Certains constructeurs de VE ne livrent pas le câble de recharge compatible avec les prises domestiques (type E/F) et imposent quasiment l'installation d'une borne à domicile. Qu'en pensez-vous ?

Laurent Lasselin : Les constructeurs ne doivent pas essayer de créer un monopole sur un système spécifique comme certains veulent y contraindre. Il faut savoir que certaines prises de recharge ne sont compatibles qu’avec les véhicules des marques qui imposent leur système. Cette pratique peut être un frein au développement du VE. Elle doit être sanctionnée.

Comment la France devrait-elle accompagner, au niveau du mix énergétique, l'arrivée des véhicules électriques ?

Laurent Lasselin : J'aurais envie de dire que le sujet n'est pas uniquement français mais qu'il est aussi Européen. Il faudrait environ 10 centrales de plus pour alimenter en même temps tout le parc automobile  français actuel. L’enjeu est de taille puisqu’on doit en même temps sortir de la dépendance aux énergies fossiles.

Pour y parvenir, il faut faire évoluer notre rapport à l'énergie. Il s’agit de moins consommer et de penser à l'empreinte énergétique que l'on peut avoir sur l'environnement. De ce fait, l’idéal serait de disposer d'un panel des plus diversifiés en production d'énergies vertueuses de l'environnement, durables et renouvelables.

Ca passe à la fois par l’investissement en R&D pour développer d'autres sources de production, mais aussi en redonnant une place importante au débat sur les énergies. Je rappelle que le Grenelle était le meilleur levier à la montée en puissance de la croissance verte et de la prise de conscience de chacun sur l'environnement.

Les enjeux sont aussi économiques et sociaux, par l'emploi.

Que souhaitez-vous dire ou faire découvrir à Michel-Edouard Leclerc en l'invitant à traverser la France avec vous en voiture électrique ?

Laurent Lasselin : Michel-Edouard Leclerc a su lire entre les lignes. Il a, à mon sens, une vision assez claire de l'avenir du VE et de l'investissement nécessaire pour le promouvoir. Il apporte une pierre à l'édifice.

Nous avons besoin de personnalités aussi impliquées personnellement, qui investissent et qui participent au développement du véhicule électrique. Nous sommes plusieurs porteurs d'idées, de projets ou d'innovations. Nous avons la possibilité de nous connecter ensemble, pour discuter et nous aider mutuellement.

Mon prochain rallye, auquel je convie Michel-Edouard Leclerc, s’appuie sur le même trajet, Monaco-Valenciennes, que j’espère relier en moins de 24 heures cette fois. Le faire ensemble nous permettrait déjà d’échanger sur le thème du VE, mais aussi sur celui de l'autopartage pour lequel j’aimerais bien recueillir son avis.

Que pensez-vous de son encart publicitaire qui prône la prise en charge par l'Etat des bornes installées aux domiciles des particuliers propriétaires de VE ?

Laurent Lasselin : Pour les particuliers propriétaires d’une maison individuelle, le garage est le lieu privilégié pour la recharge complète du véhicule électrique. C’est là qu’il passe le plus de temps. En règle général, on y trouve une prise électrique, d’autant plus qu’elle est imposée par les normes de construction moderne.

En revanche, il manque effectivement des prises dans les copropriétés d'immeubles, leurs parkings et les lieux publics. Dans ces derniers, ce sont les bornes de recharge rapides (moins de 30 minutes) ou semi rapides (1h20 environ) qui sont à privilégier. Elles devraient être accessibles à toute heure et à tout européen, contre, par exemple, règlement par carte bancaire.

Le Conseil régional du Nord-Pas-de-Calais a lancé un appel à projets pour le déploiement de bornes dont il prendra en charge l'installation.

Véhicule électrique bornes de rechargement

Charge de la iOn dans un parking © Laurent Lasselin

Et de son implication dans l'installation de bornes sur les parkings de ses centres commerciaux ?

Laurent Lasselin : Michel-Edouard Leclerc a su anticiper où les autres n’ont pas encore réagi. Les centres commerciaux sont des lieux stratégiques qui font partie de la chaîne de recharge, après le domicile et le lieu de travail.

Sa vision est excellente et elle a du sens. Les stations-service devraient être équipées de bornes ultra-rapides qui permettraient une recharge en moins de 10 minutes. Les centres commerciaux doivent faire partie du projet global d'installations d'infrastructures, au même titre que les parkings publics.

Souhaiteriez-vous que les acteurs professionnels privés s'impliquent davantage dans le développement des bornes de recharge ?

Laurent Lasselin : Oui ! Un réseau de professionnels ou d'investisseurs peut être une solution pour renforcer le déploiement. Ils pourraient s'associer pour fonder une chaîne nationale d’infrastructures de recharge en libre accès, ou même de sociétés de location de VE en self-service, et pourquoi pas les deux comme le font certains opérateurs (NDLR : Autolib’ par exemple). Par ce biais, seraient créés des emplois et des entreprises en rapport avec la mobilité électrique. On a tout à y gagner !

L'Europe est aussi un levier qu'il faut actionner pour voir fleurir des projets dans tout l’espace de la communauté.

L'actuelle politique de l'Etat pour promouvoir le véhicule électrique est-elle suffisante ?

Laurent Lasselin : Nous sommes à la fin d'un cycle, d'un système économique et industriel qui arrive à bout de souffle. Un nouveau modèle est à dessiner, à façonner, dans le secteur automobile. Une automobile qui se veut plus respectueuse de la santé des hommes et de la préservation de notre planète. C’est ce modèle qu’il faut donc booster, à tous les niveaux, pour permettre une croissance verte et un vecteur d'emplois nouveaux et parallèles. Aussi bien au sommet de l'Etat, que dans les industries et auprès des leaders économiques

Quels conseils ou quelles attentes pourriez-vous formuler à ce sujet à destination du gouvernement ?

Laurent Lasselin : Pour réussir, il faut s’en donner les moyens ! Le Grenelle a su impulser un élan à cette croissance verte, mais il a vite été freiné par le délestage des niches fiscales.

Il faut peut-être faciliter l'investissement d'entreprises, avec des allégements de charges par le biais de niches fiscales justement, plutôt que d'avoir une augmentation du nombre de chômeurs et une économie qui fait du sur place.

Favoriser les énergies renouvelables, réduire notre consommation énergétique, former les gens aux nouvelles pratiques, valoriser les déchets ménagers pour la production d'électricité  et de chaleur, pousser les nouvelles technologies, développer l'hydroélectricité sont également des pistes à continuer d'exploiter.

Wehicles remercie Laurent Lasselin pour le temps qu’il a ici consacré à exposer ses convictions et motivations. L’appel est donc lancé une nouvelle fois à l’attention de Michel-Edouard Leclerc, pour qu’il participe avec lui à son prochain rallye Monaco-Valenciennes. 

Pour aller plus loin

 

Rédigé par laurent Lasselin

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